Vous me posez très souvent la question : “Dr, vous avez des astuces faciles pour manger équilibré ?” Voici ma réponse simple en vidéo, mais laissez-moi vous expliquer pourquoi ce n'est pas clair pour vous aujourd’hui.
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Chère BienMangeuse, cher BienMangeur,
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Connaissez-vous les AJR, acronyme d’apports journaliers recommandés ? Je vais vous expliquer ce que c’est et pourquoi aujourd’hui, nous avons du mal à suivre des consignes qui semblaient évidentes pour les générations précédentes.
15 % de protéines, 35 % de lipides et 50 % de glucides… explications !
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Ce sigle, qui figure sur les emballages de tous les produits alimentaires, indique des valeurs-repères de référence permettant d’évaluer la qualité nutritionnelle d’un produit par rapport aux besoins de la population (évalués en termes de carences).
Leur mise au point a bénéficié de l’évolution d’une discipline qui n’apparaît en France, au niveau médical, qu’en 1985 : la nutrition. Cela vous dit quelque chose ? :)
Stricto sensu, cette science analyse les rapports entre la nourriture et la santé, grâce à l’étude de la composition des aliments, de leurs propriétés et de leur utilisation par l'organisme, et des comportements alimentaires des individus.
Pour les protéines, la paume de votre main comme repère
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Un savoir longtemps considéré comme le parent pauvre de la médecine avant qu’on se rende compte de ses potentialités, notamment dans la prévention d’un certain nombre de maladies.
Les auteurs des AJR ont fait preuve de la plus grande rigueur scientifique en présentant leurs recommandations, puisqu'ils ont énoncé d'emblée les difficultés qu’il y avait à élaborer un modèle parfait.
La variabilité des aliments, des populations, des connaissances, ainsi que la difficulté de mettre en œuvre les études nécessaires à l’établissement de ces préconisations empêchent en effet toute certitude absolue.
En plus de la variété des aliments, il faut prendre en compte le mode de vie
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Dès lors, par sécurité, ces AJR ont été majorés d’environ 15 %, à la hausse comme à la baisse. Ce qui explique pourquoi nous, nutritionnistes, nous battons pour expliquer que, parfois, les doses recommandées sont supérieures à celles d’autres pays – notamment le calcium – par simples raisons de sécurité.
Les initiateurs ont par ailleurs souligné la nécessité de répéter ces études régulièrement, afin qu’elles restent les plus fiables et proches de la réalité possible.
Ces travaux étaient initialement censés permettre à l’industrie alimentaire de peaufiner son repérage des carences afin de proposer des créations, produits ou plats adaptés. Au final, les apports journaliers conseillés lui ont surtout servi à nous inonder de chiffres inutiles noyant le poisson.
La pyramide alimentaire, une façon d’avoir des repères simples
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Plus personne, aujourd'hui, pas même un nutritionniste émérite, n’est capable de calculer avec précision la totalité de ses apports en vitamines D, C, B ou en oligo-éléments à la fin d’une journée ! Un comble, non ?
En amplifiant le discours hygiéniste avec des chiffres d’une précision diabolique, que, parfois, j’ai moi-même eu tort de répéter, je crains que les AJR aient eu l'effet inverse de celui recherché.
Non pas simplifier la prise de conscience individuelle et la responsabilisation de chacun face à la nourriture, mais au contraire tout complexifier au point de conduire chacun à la panique, ensuite à l'abandon, puis dans les bras de communautés ou religions alimentaires plus simples à comprendre ou appréhender.
Que penser du PNNS ?
Le plus effarant dans ce cas précis, c'est de voir qu'on est parti d'une idée logique, simple, destinée à faciliter la compréhension nutritionnelle des Français pour aboutir à un résultat opposé.
Pour mieux comprendre, il faut des conseils simples et clairs
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Par quel revirement de situation cela a-t-il pu arriver ? Eh bien, sans doute parce que les recommandations générales, officielles, ne sont pas aisément acceptables.
Le Programme National Nutrition Santé (PNNS), lui, pâtit du défaut inverse. Partant du principe qu'il faut éduquer les masses en usant d'un discours simple, il professe des recommandations on ne peut plus modérées, c'est un euphémisme.
Du genre, et je l’admets, la tentation est grande de tourner en dérision ces conseils simplistes :
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“mange ta soupe”,
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“bois ton lait”,
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“n’abuse pas des sucreries”,
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“ne bois pas trop d’alcool”,
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“essaye de varier ton alimentation”...
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Or qui ne sait cela ?
Et la soupe, ça fait vraiment grandir ?
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Certes, l’éducation nutritionnelle de la population est insuffisante et il est sans doute bon de rappeler des préceptes aussi basiques, mais je crains que l’imprécision des préconisations ait l'effet inverse à celui recherché en contribuant non seulement à la diffusion de fausses informations, mais à l’utilisation quasi frauduleuse de certaines données scientifiques.
Aucun conseil ni directive pris isolément n’est suffisant ; voilà pourquoi il n’existe pas de recette précise, peut-être heureusement d’ailleurs, pas de loi alimentaire permettant d’éviter les maladies ou d’en guérir.
Il me semble plus intéressant, en revanche, de persévérer dans la recherche nutritionnelle pour aboutir enfin à des recommandations utiles.
Les bonnes ou mauvaises habitudes alimentaires, un héritage souvent familial
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Pour être clair, les AJR sont une bonne chose, vont dans le bon sens, mais, au stade actuel de développement des données, il me paraît indispensable d’informer le lecteur de l’imprécision des mesures.
D’autant qu’une étude récente démontre clairement l'existence d'une relation très forte entre la compréhension, la vulgarisation des consignes nutritionnelles et leur application. Ce qui laisse une lueur d'espoir.
Je ne vais pas répéter ici les recommandations détaillées du PNNS, cela serait superflu car vous les entendez tous les jours et je les ai, certes avec un peu d'ironie, rappelés un peu plus haut.
Mais sachez que tendre vers ces objectifs est le moyen d’atteindre un meilleur équilibre nutritionnel, d’avoir un apport adéquat en fibres, minéraux et vitamines, de réduire le risque d’être ou de devenir obèse, hypercholestérolémique et/ou hypertendu, et de diminuer le risque de développer certaines maladies.
Manger équilibré et respecter les apports journaliers recommandés, c’est à la portée de tous.
Regardez bien cette vidéo, elle va vous donner les astuces pour composer, à chaque repas, une assiette équilibrée. Si vous suivez bien ces premiers conseils, c’est déjà une victoire pour moi, et vous verrez vite les résultats.
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Votre bien dévoué,
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